Messages : 264 Date d'inscription : 27/12/2019 Faceclaim : Jeffrey Dean Morgan Copyright : Chouu' Âge : 42 Aka : Ike Côté ♥ : Veuf Métier : Enquêteur privé Gang : Sons of Anarchy
Mercredi. Ça y est. Il est bientôt 20h30 et j'imagine que le quart d'heure de politesse peut s'étendre à vingt, vingt-cinq minutes quand on vient d'Irlande. Je plonge les mains dans les poches de mon jean et fais quelques pas le long de la pièce. Les deux jours qui viennent de passer m'ont paru péniblement longs, atrocement courts. J'ai pu, entre autres, traiter un dossier de A à Z et rendre visite à Alys. Mais aucun progrès malheureusement concernant l'étrange facteur de Charming. Ce n'est pas vraiment ce qui a occupé mes pensées ;
Alors que le bon vieux jazz de Miles Davis est soufflé par deux enceintes, je jette un dernier coup d’œil à l'appartement. C'est sans doute stupide, mais j'appréhende l'arrivée de Llewyn. J'ai d'abord peur qu'elle ne vienne pas - ç’aura été tellement d'angoisses pour rien. J'ai peur de ce que le lapin pourrait sous-entendre. Et puis non, je pense qu'elle viendra. Et ça me fait encore plus flipper. La rousse-filante est ma concurrente favorite sur le bitume. Dehors. Sur un parking plus que sur la route ces dernières fois mais pas dans un cadre aussi privé, bien que ce logement soit aujourd'hui relativement impersonnel. Après avoir tant transpiré la vie de famille, la gaieté, l'amour, on dirait une garçonnière ... alors que je suis veuf et qu'aucune conquête n'a mis les pieds ici depuis longtemps. Je n'invite pas grand monde ;
Je passe une main nerveuse contre ma nuque. Sur le bar qui sépare salon et cuisine, j'ai débouché une bouteille de vin français pour l'aérer. Sur la table basse, devant le canapé clair, j'ai volontairement déposé un magazine sur lequel une Harley fait la première. Je ne l'ai jamais lu, mais puisqu'elle avait besoin de se rassurer sur ma bécane, l'irlandaise - et que la taquiner devient une vraie passion ; Peu de choses personnelles au final, l'essentiel de mes souvenirs sont barricadés dans le bureau, au fond de l'appartement. Mais à cause du peu de recul, de l'habitude et du manque sans doute, je n'ai pas pensé à retirer les deuxcadres qui rappellent discrètement, à qui veut bien être attentif, qu'une famille vivait là.
Le bruit d'un véhicule se fait entendre aux pieds de l'immeuble et cette arrivée me balance une décharge d'avidité : la partie va reprendre et j'ose espérer ne pas la gâcher cette fois. Il s'agit bien de Llewyn, premiers pressentiments dissipés. Dans un dernier sursaut je pense à retirer mes lunettes - ne pas si vite lui donner une raison de se moquer - et je lui ouvre la porte avec un sourire sincère pendu aux lèvres.
" ... Hey ! J'allais commencer à m'inquiéter. "
Pour elle, même si ses compétences de pilotage la tiennent normalement à l'écart de l'accident. Plus qu'un autre ; Pour moi et ma stupide impatience, ça devenait difficile à gérer. Pour notre jeu, qui semble s'être enrayé aux prémices de la partie ;
" C'est comme ça que les irlandaises se font désirer ? "
HARLEY-
❝Llewyn Oswell❞
Messages : 267 Date d'inscription : 24/12/2019 Faceclaim : Polly Ellens Copyright : étangs noirs (ava) - frimelda (signa) Âge : 29 ans Aka : Oz Côté ♥ : Divorcée. Célibataire, donc. Métier : Transporteuse. Gang : Bithbeo
Llewyn claqua sans violence la porte de la vieille Chevrolet. Elle en condamna l’accès d’un mouvement automatique du poignet sans même prendre la peine de regarder ce qu’elle faisait, son attention déjà portée sur la gueule d’entrée de l’immeuble. Retirant la clé de la serrure, elle avisa la façade d’une sobriété écrasante puis leva le nez vers les étages, l’envolée de fenêtres derrière lesquelles s’agitait peu à peu la vie nocturne, cherchant à déterminer quelles vitres du deuxième niveau séparaient Vaughn du reste du monde. Elle abandonna bien vite le jeu par manque d’indices et, plutôt que de chercher à remporter la manche à la loyale, résolut de tricher en allant frapper directement à l’appartement de son ancien adversaire pour obtenir la réponse à son interrogation.
Dans un coup d’épaule, la rousse réajusta le pack de bières qui menaçait glisser d’en-dessous son coude avant de se mettre en branle. Les semelles de ses Dr Martens erraflèrent l’asphalte dans un crissement doux alors qu’elle approchait le seuil de la résidence. Par curiosité, la jeune femme se hasarda à lire la cascade de noms associés à chaque sonnette, se demandant sous quelle identité l’enquêteur pouvait bien vivre caché.
Pour ne pas faire patienter plus longtemps le quadragénaire - et puisqu’il était évident qu’elle ne trouverait jamais son patronyme du premier coup -, Llewyn s’engouffra dans le hall d’entrée qui s’illumina à peine elle y posa le pied. Elle promena son regard sur ce premier aperçu de l’intimité de l’Américain qu’elle traversa de part en part pour rejoindre la cage d’escalier. Interrompue dans sa progression par l’éclat terne d’un miroir de plein pied, elle revint sur ses pas jusqu’à s’immobiliser devant la glace et jauger l’état général du reflet qu’il renvoya.
Ce fut d’abord la fatigue qu’elle lut sur son propre visage. La transporteuse avait quitté Tucson aux premières lueurs du jour pour s’assurer de retrouver à temps les rues charmantes de sa ville d’adoption. Quelques treize heures et huit-cent miles plus tard, elle s’était glissée sous le jet brûlant de sa douche pour rincer l’usure de la journée et l’engourdissement de ses muscles. Malheureusement, le contact trop bref de l’eau n’avait pas lavé intégralement les signes de faiblesse. De la pulpe de ses doigts tatoués, l’expatriée frotta un peu les cernes qui soulignaient ses yeux clairs, espérant les effacer aussi simplement que cela. Mais ils restèrent bien en place, la narguant presque.
Un souffle lourd brisa la tranquilité de l’entrée. Le regret de n’avoir fait plus d’effort que cela lui traversa l’esprit alors qu’elle dressait brièvement l’état des lieux. Le strict minimum aurait fait un bon début : un peu de mascara pour souligner ses orbes clairs ourlés de longs cils noirs, un rien de rouge-à-lèvres pour couvrir les taches de rousseur qui mordaient le contour de ses lippes, du fond-de-teint, pourquoi pas, pour couvrir le souvenir jaunâtre laissé par Niall. Llewyn passa une main dans ses cheveux pour rabattre quelques mèches rousses vers sa nuque. Lentement, comme une enfant boudeuse, elle tira les manches de son blouson pour les réajuster en soupirant. À quoi bon se farder d’artifices puisque son hôte l’avait déjà vue telle qu’elle était : couverte d’encre et d’éphélides qui faisaient finalement un maquillage suffisamment soutenu pour n’avoir pas envie d’en ajouter encore.
L’Irlandaise s’ébroua pour chasser de son esprit les trop nombreux « si » qui l’assaillirent. D’un pas leste, elle s’engouffra dans l’escalier, grimpant deux par deux les marches qui la menèrent jusqu’au deuxième palier. Là, elle fit quelques mètres dans le couloir en tendant l’oreille, cherchant à déceler derrière quelle porte le quadragénaire pouvait bien se trouver. Finalement, le panneau de bois le plus proche s’ouvrit dans un grincement, découvrant la figure de plus en plus connue de Vaughn, spécialement illuminée d’un sourire accueillant.
« ... Hey ! J'allais commencer à m'inquiéter. »
Elle roula les yeux en se hâtant de le rejoindre pour se faufiler à l’intérieur. Le brun referma derrière eux, lâchant une petite pique aux allures de reproches :
« C'est comme ça que les irlandaises se font désirer ? - Qu'elles continuent à se faire désirer, corrigea-t-elle d'entrée de jeu. »
Parce qu’il n’avait pas cessé de le faire entre leur dernière entrevue et maintenant, pas vrai ? Elle ne serait pas là sinon.
Il marquait cependant un point : Llewyn s’était fâchée avec la ponctualité depuis plusieurs années déjà. Il n'y avait jamais que dans son travail qu'elle parvenait à être à l'heure par Dieu savait quel miracle. Plus jeune, elle s’efforçait de combattre son retard permanent pour faciliter la gestion d’agenda de ses frères et sœurs, mais elle avait abandonné la lutte à présent qu’ils étaient grands. Qu’ils se géraient plus ou moins seuls. Qu’il n’y avait plus de spectacle de noël ou de fin d’année auquel assister.
« Désolée … Je suis ce genre de gonzesse qui a besoin de deux heures pour choisir une tenue et une de plus pour se maquiller. »
L’ironie de ses propos claqua contre les murs de l’appartement. La jeune femme fit un rapide tour d’horizon, ses prunelles balayant la pièce principale. Elle s’approcha du bar à pas feutrés pour y déposer les quelques bières qui devaient égayer leur soirée. Les bouteilles s’entrechoquèrent quand elle fit glisser le carton sur le plan de travail pour les entreposer à côté d’une bouteille de vin déjà ouverte.
Llewyn fit tomber son sac à dos de son épaule. En équilibre sur une jambe, l’autre légèrement levée pour laisser reposer le cul de son barda sur sa cuisse, elle ouvrit la poche principale et en sortir une bouteille de single malt japonais qu’elle laissait à l’entière disposition de son hôte. Elle lui devait bien ça. Son affaire faite, l’Irlandaise posa ses affaires au sol pour se défaire de sa veste.
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❝Vaughn I. Dixon❞
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- Qu'elles continuent à se faire désirer, [...] Désolée … Je suis ce genre de gonzesse qui a besoin de deux heures pour choisir une tenue et une de plus pour se maquiller. »
Llewyn se fait désirer, à sa manière. A l'irlandaise, si on l'écoute. Alors c'est ainsi que ces iliennes procèdent ? Naturellement trop jolies, le caractère éméché, provocatrices à la limite de l'insolence, subtiles dans les mimiques, d'une franchise étonnante dans les gestes, un parfum envoutant et des lèvres qui appellent ; elles recouvrent tout cela d'un voile d'inaccessible, d'une distance prudente, de mise en garde dans le fond des yeux. Enfin, elles, je ne sais pas. Mais elle ;
" Pas de soucis surtout que le travail est, remarquable. "
Dis-je en sifflant l'ironie sur le même ton. Et sans mentir. Si je vois que la demoiselle n'est pas adepte des grandes mises en beauté, je vois surtout qu'elle est séduisante. J'imagine que ça vaut les deux heures dont certaines ont besoin pour ressembler à une jolie femme.
Personnellement si j'ai tenté d'ordonner mes cheveux et que ma barbe est taillée de près, je n'ai pas essayé de ressembler à quelqu'un d'autre. Je suis tel qu'elle me connait, ma foi, j'ai enfilé une chemise sur un jean basique et ne porte pas le fameux blouson. Une large montre au poignet, un bracelet auquel je tiens particulièrement de l'autre côté, mes tatouages suffisent à remplir mes avants bras. Remarque, ils paraissent nus à côté des siens.
Les bières et le whisky déposés sur le bar près de la bouteille française, la rousse-filante semble enfin déchargée. Je lui propose de récupérer son sac et sa veste dans le but de les accrocher sur la patère prévue à cet effet.
" Merci pour les boissons. "
Pas la peine de préciser que j'ai ici tout ce qu'il faut. La politesse est agréable, inutile d'entrer dans des embrassements grotesques. Je suis sûr que nos caves respectives sauront nous contenter, l'une et l'autre. Les gourmandises ne sont jamais de trop. Ceci fait, je lui présente la pièce à vivre d'un geste évasif.
" Bienvenue ! Qu'est ce que tu veux boire ? Pour commencer. Assieds-toi où tu veux. "
Le canapé, très confortable, sans doute un peu trop, l'attend impatiemment mais les deux hauts tabourets situés devant le bar sont de redoutables concurrents à l'heure de l'apéritif. Je la laisse s'installer et nous sers la boisson de son choix.
" Si j'ai bien compté... t'es rentrée aujourd'hui. Pas trop dur ? "
Par réflexe - je suis étrangement à l'aise en compagnie de Llewyn dans cet appartement que j'ai du mal à supporter - j'attrape mes lunettes et les pose sur mon nez afin de déchiffrer les annotations sur la bouteille du vieux continent. On me l'a juste conseillée, je me suis peu renseigné autrement. Après avoir intérieurement abîmé le français, je retire la paire d'yeux artificiels pour placer la véritable sur ses orbes clairs.
" Ah, j'ai trouvé un magazine utile pour ta culture personnelle. Histoire de corriger ce que tu crois savoir des Harley ; vis à vis des Indian surtout. "
Je lui indique la table basse où traîne l'hebdomadaire acheté pour l'occasion. L'attention maladroite me fait sourire, pourvu qu'elle n'offense pas mon invitée.
A part mes bourdes inévitables, tout me paraît parfait. La fraicheur de son sourire, les tâches mouvantes sur son visage, sa chevelure rousse ou sa voix si plaisamment érayée : j'avais du mal à la projeter ici. Maintenant que c'est fait, je suis soulagé. La jeune femme dégage un charme qui redonne des couleurs à l'appartement Dixon ; Ou à ma vision des choses.
HARLEY-
❝Llewyn Oswell❞
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La jeune femme décocha à son interlocuteur un sourire charmant pour le remercier du compliment qui, même chargé d’une ironie similaire à celle dont elle usait parfois un peu trop, n'en sonnait pas moins sincère. Trente secondes avaient suffi pour se glisser dans une paire de jeans noirs et un pull gris chiné dont l’échancrure engageante dévoilait un peu plus que ce à quoi Vaughn s’était habitué. Quand l’encolure du vêtement sombre qu’elle portait lors de leur dernier tête à tête autour d’un verre soulignait à peine le barbelé qui crevait le derme juste sous les clavicules, celui-ci laissait entrevoir plus de peau, plus de taches, mais également plus d’encre. Enserrée d’une pudeur involontaire, Llewyn n’offrait cependant aux yeux du quadragénaire que quelques millimètres d’une ligne terminée par un point final, utopiste. Il faudrait bien un ou deux rendez-vous de plus pour qu’enfin le chemin tortueux et la spirale de l’unalome soit entièrement révélés.
En hôte digne de ce nom, Vaughn s’empressa de récupérer les affaires de son invité cependant qu’il la remerciait de l’offrande apportée. La rousse articula une réponse de courtoisie muette, un sourire simple aux lèvres. Si bancale que fut son éducation, on lui avait appris assez tôt qu’on ne pouvait arriver chez quelqu’un les mains vides. D’autant qu’elle s’était quelque peu imposée. Et qu’elle devait toujours une bière au Son.
Le motard revint sur ses pas et désigna d’un geste ample la pièce principale de son appartement. Llewyn, dont la curiosité ne connaissait de limite, profita de cette invitation pour laisser traîner un peu plus son regard. Elle détailla rapidement le mobilier et la décoration presque inexistante, relevant un froid dérangeant qu’elle ne connaissait pas à son interlocuteur, lui qui respirait habituellement une assurance et un charme brûlants.
« Bienvenue ! Qu’est ce que tu veux boire ? Pour commencer. Assieds-toi où tu veux. »
La transporteuse avisa le canapé et le danger d’une proximité oppressante, tentante. Ses muscles engourdis par la route et son instinct de conservation lui indiquèrent le tabouret de bar comme unique solution pour garder éloigné un homme dont elle appréciait déjà trop le contact, aussi fugace soit-il. Sans se faire prier, elle s’installa sur son nouveau perchoir, les pieds fermement campés au sol pour n’y poser qu’une moitié de fesses. Elle avait passé treize heures le cul vissé à un siège - pourtant confortable - ; rester un peu debout ne pouvait faire de mal.
« Le vin ira bien. »
Le pinard déjà ouvert l’appelait, quand bien même elle n’était pas la plus grande amatrice du produit des vignes qu’appréciaient tant les Français et les Américains en manque d’originalité. En matière d’alcool, les goûts de la jeune femme oscillaient entre malt et houblon, avec un léger détour du côté du jus de canne et des baies de genévrier de temps à autres. Mais puisque sceller à nouveau le rouge semblait inapproprié, elle se ferait une joie d’aider le maître de maison à toucher le fond de la bouteille.
Elle récupéra le verre qu’on glissa à son intention et y porta le nez pour s’assurer, à l’odeur, que la boisson serait à son goût. Llewyn ne s’encombra pas du rituel incompréhensible des œnologues : elle reposa immédiatement le vin sur le bar pour attendre Vaughn. Tant pis pour la couleur de la robe à apprécier, tant pis pour les différents parfums ou les gouttes à analyser le long de la paroi. Elle n’entendait de toute manière rien à ce simulacre et se contentait de faire confiance à ses papilles pour déterminer la qualité du breuvage. Bien élimées par le whisky et la bière, il ne leur fallait pas grand chose pour être satisfaites. C'était un avantage.
« Si j’ai bien compté… t’es rentrée aujourd’hui. Pas trop dur ? - Non ça va, j’ai l’habitude, répondit-elle en haussant les épaules. »
Presque douze ans de métier, sans compter les petites courses peu légales effectuées à l’adolescence dans les rues de Belfast. Ingérer des centaines de miles d’asphalte ne l’effrayait plus depuis bien longtemps. Se lever aux aurores pour éviter les contrariétés routières et être sûre d’arriver à temps à un rendez-vous qui aurait pu être repoussé par confort était déjà un peu plus usant. En témoignaient ses traits légèrement tirés et les traces bleues sous ses yeux. Elles accompagnaient à merveille l’ecchymose jaune sur sa pommette. Un vrai pot de peinture, le maquillage en moins.
Les orbes gris de l’expatriée se posèrent sur Vaughn qui, après s’être servi, enfila une paire de lunettes pour se pencher sur l’étiquette de la bouteille. Elle esquissa un sourire discret en se disant que l’air grave conféré par ces verres-là ajoutaient au charme naturel du propriétaire des lieux. Un rien de déception la piqua d’ailleurs quand il se défit de ses binocles.
« Ah, j'ai trouvé un magazine utile pour ta culture personnelle. Histoire de corriger ce que tu crois savoir des Harley ; vis à vis des Indian surtout. »
L’Irlandaise allongea le cou pour jeter un œil par-delà le canapé. Elle se laissa glisser du tabouret et chemina rapidement jusqu’à la table du salon pour ramasser le catalogue en question. La couverture vantait les mérites de l’un des prochains véhicules préparés par Harley-Davidson : un roadster à l’allure résolument moderne qui semblait s’éloigner des sentiers battus pratiqués par la marque au point d’être labourés. Sportive, une gueule marquante sans paraître extraordinaire pour autant. Si Vaughn essayait de la prendre par les sentiments, son concepteur fétiche et lui pouvaient mieux faire. Llewyn plongea néanmoins le nez dans le magazine en tournant rapidement les pages alors qu’elle revenait vers la cuisine. L’odeur caractéristique de l’encre couchée sur un papier glacé lui prit le nez. Elle s’en imprégna un peu, distraitement, jusqu’à rejoindre le bar sur lequel elle posa sa lecture, se postant non loin de l'hôte.
« Ça te va bien, commenta-t-elle sans lever les yeux. Les lunettes … »
Une œillade furtive vers le membre de SAMCRO avant de retourner à ses contemplations. Le compliment se faisait sans sous-entendu. L’armature noire de la monture soulignait l’autorité magnétique des prunelles du brun, offrait un poids supplémentaire à ses regards charmeurs. Elle n’y était pas insensible en temps normal, qu’importe que ses lèvres soufflent le contraire, elle fut davantage conquise à lui trouver cet accessoire ô combien seyant.
L’expatriée, pour se changer les idées, tourna les pages jusqu’à tomber sur le test complet de la Bronx mise à l’honneur dans l’édition feuilletée. Elle esquissa un sourire vaporeux et poursuivit :
« C’est pour m’impressionner en te donnant un air sérieux ? Ou tu en as réellement besoin parce que tu te fais vieux ? Elle le piqua du regard, taquine : tu as quoi, quarante-cinq, quarante-six ans ? »
Environ. Vaughn avait dépassé la quarantaine mais ne devait pas se trouver si proche que cela de la cinquième décennie. Ses cheveux poivre et sel, ses traits doucement marqués, son timbre de voix chaud et vibrant, l’assurance de ses mouvements, étaient autant d’indicateurs qui tenaient le compte des années. Chaque lustre avait laissé sa trace, ajoutant visiblement du charisme à cet homme.
Llewyn récupéra son verre et le leva pour trinquer :
« Sláinte ! Merci de m'accueillir. »
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❝Vaughn I. Dixon❞
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Féline, avec cet air détaché qui la rend péniblement inaccessible, Llewyn fait l'effort de récupérer le magazine prônant l'un des modèles de Harley. Je l'observe tourner les pages et m'amuse de la stupide lecture que je lui impose. Enfin. Elle ne prend pas vraiment la peine de lire mais ses beaux yeux survolent le papier brillant pour m'offrir un reflet délicieux. Je souris bêtement.
Puis l'irlandaise revient à mes côtés pour envoyer balader la Harley. Ce sont toutes les motos qu'elle dégage de mes pensées et bien tant de sujets quand elle émet un jugement - positif - sur ma personne. Je ne suis pas un type en manque de confiance. Pourtant sa réflexion me rassure. J'attrape les lunettes que je venais de laisser pour les faire tourner sur elles-mêmes. Distraitement. Pourquoi je les porte, en réalité ?
" Merci. "
« C’est pour m’impressionner en te donnant un air sérieux ? Ou tu en as réellement besoin parce que tu te fais vieux ? [...] tu as quoi, quarante-cinq, quarante-six ans
" Hm uniquement pour me donner un genre, le côté intelligent qu'il me manque. Sans doute. Je ne peux plus rivaliser avec les bras musclés des jeunes alors j'essaie un autre... Style. "
Il fut un temps où je pensais que les muscles bien sculptés de mon corps étaient une des clés auprès de ces dames. Puis on devient moins con. Et les femmes rencontrées présentent elles aussi des goûts et atouts moins superficiels.
L'humour de ma remarque dissimule mal la légère plaie ouverte l'autre soir. Bête. Sournoise. Cette pointe noire et infectée de jalousie, quand Llewyn côtoie Zakk. Une fois, de loin, sans que je voie le moindre signe de proximité. Mais ils étaient là. Elle et un Son. Un autre. Comme le chauffeur irlandosh' que je n'ai pas eu le cran d'attendre ou tout ceux que je ne suis pas. Mon regard s'esquive une seconde puis je hoche la tête, corrigeant sa fourbe moquerie - ou triste avis - sur l'âge que renvoi mon visage.
" Et je viens d'avoir quarante-deux ans, merci pour les années de bonus. Et toi, rouquine ? T'es adulte au moins ? "
Dis-je en trinquant avec cette invitée fascinante. Unique. Cette différence est positive la plupart du temps, lors de nos rencontres. Toujours en fait, sauf ces rares fois où je réalise que notre non-relation me bouscule de façon démesurée et surtout indéfinissable. Mystérieuse. On se connaît si peu. On s'est pourtant cerné si vite. Inconnus mais camarades, pas des amis, rivaux par jeu, hôtes ; Et j'en veux plus.
" À la tienne. C'est un plaisir. "
Je porte le vin à mes lèvres tandis que mes yeux glissent dans ses cheveux brillants. Puis sur sa joue marquée par son abruti de compatriote. En replaçant le verre sur le comptoir, je récupère le tabloïd que j'envoie valser sur le fauteuil derrière nous, ne laissant sur le bar que des boissons.
" Au fait mauvaise nouvelle : je ne suis pas cuistot. Le vin français c'est pour le style toujours. Donc j'ai sorti un ensemble de, euh, trucs à grignoter. Et quand tu auras vraiment faim - si ça vient - on commandera des pizzas. Qu'est ce que t'en dis ? "
Tout en parlant je me lève dans le but de déposer sous son nez quelques crudités accompagnées de plusieurs sauces, des tristement populaires chips et même des olives. Considérant l'absurde plateau, j'enfonce les mains dans les poches de mon Jean.
" Voilà je pense que j'ai totalement perdu le minimum de classe que ma Harley se tue à me donner. Mais si ça te dit quand-même je me disais, enfin, nos courses me manquent. Alors à l'occasion... "
Replaçant mes lunettes sur mon nez - si la rousse-filante était sincère, je ne suis pas plus désagréable à regarder avec - je lui passe devant, la frôlant légèrement, afin d'attraper une olive que je place entre mes lèvres.
HARLEY-
❝Llewyn Oswell❞
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Vaughn se montrait plus que tolérant et généreux envers une femme qui n’avait pas hésité une seule seconde à s’inviter chez lui. Et elle se demanda s'il se serait montré aussi accueillant en d'autres circonstances. Il avait somme toute eu le choix : le refus était une option envisageable, jamais Llewyn ne se serait offusquée s’il avait décliné cette proposition pour le moins incongrue. Au contraire, l’entendre accepter, à l’autre bout du fil, l’avait plus étonnée qu’autre chose. Bien-sûr, elle aurait toujours pu lui proposer de se rejoindre à la maison, mais elle aimait mieux le luxe simple d'être chez un autre, pour un millier de raisons au moins. On s'échappait plus facilement lorsqu'on n'était pas chez soi. La manie terrible de la rouquine de tourner les talons pour mieux déserter la compagnie de son hôte n'aurait pas eu de sens sous son propre toit. Puis il y avait Siobhan. Son rythme diurne, ses révisions, ses examens, la nécessité du calme en semaine pour lui permettre de réussir sa vie et prouver au monde entier que les Oswell savaient être autre chose que les chiens de la mafia irlandaise. Il y avait son regard aussi. Les yeux cuivrés de la gamine se couvraient de reproches dès qu'un homme franchissait l'entrée de leur petit havre de paix. Qu'importe la ferveur qu'elle mettait à dissimuler sa mauvaise foi, Llewyn connaissait trop sa sœur pour ne pas sentir le poids de ses orbes juges et moralisateurs. C'est qu'elle n'avait pas digéré Russell. Même après tout ce temps.
La petite avait à peine dix ans quand il était entré dans leur vie à tous en défonçant à coups de sourires charmeurs les barricades qui cernaient le cœur de son aînée. Son rire, sa douceur franche, sa personnalité piquante et sa présence rassérénante avaient empli la petite maison bancale de Bryson Street. Siobhan s'y était foutrement attachée, comme n'importe quelle gosse en manque de réelle figure parentale l'aurait fait. Elle avait construit son adolescence avec Russell comme membre à part entière de la famille, pensant qu'il ne la quitterait jamais. Parce qu'on ne se mariait pas à la légère. On ne se lançait pas dans cette entreprise-là en voulant tout avorter après quatre ans d'union. Comme elle avait été déçue.
Vaughn trinqua doucement, un sourire aux lèvres, non sans avoir remercié dignement son invitée d'avoir écorché à ce point son âge. Mauvais joueur, il se vengea du mieux qu'il le put : lui retirant une bonne douzaine d'années pour lui rendre le caractère juvénile qu'elle avait oublié depuis trop longtemps.
Sa jeunesse retrouvée, Llewyn échappa un rire fluet qu'elle noya vite dans une gorgée de vin. Les nombreuses crèmes anti-âge faisaient donc effet, c'était toujours agréable de l'apprendre. Elle aurait cependant mieux aimé qu'elles effacent les années de trop gravées dans son âme que celles inscrites en rides minces sur son visage. Mais ces choses-là ne connaissaient aucun élixir de jouvence, pas vrai ? La drogue, peut-être ? Les paradis artificiels ? Ces cristaux bleus qui courraient la ville depuis peu ? Le petit paquet en contenant traînait encore dans un fond de tiroir de la chambre de la jeune femme depuis qu'elle l'avait découvert dans la boîte-aux-lettres. Elle se serait laissée aller à leur douceur si elle avait été plus faible.
L'Américain s'agita. Dans un mouvement rapide, il récupéra le magazine et l'envoya voir le canapé de plus près.
« Au fait mauvaise nouvelle : je ne suis pas cuistot. Le vin français c'est pour le style toujours. Donc j'ai sorti un ensemble de, euh, trucs à grignoter. Et quand tu auras vraiment faim - si ça vient - on commandera des pizzas. Qu'est ce que t'en dis ? - Je suis déçue, mais j'imagine ne pas vraiment avoir le choix ? »
Elle battit des cils avant de tremper à nouveau ses lèvres dans le liquide carmin qui dansait dans son verre. Mauvaise cuisinière également, Llewyn ne se serait pas permis de juger le maître des lieux. D'autant que la pizza était un réconfort à tous les maux et manques de talent.
Rapidement, quelques apéritifs terminèrent leur course sur le bar alors qu'elle reprenait place sur le tabouret haut. L'expatriée troqua volontiers le vin contre quelques chips quand son interlocuteur se répandait en excuses confuses :
« Voilà je pense que j’ai totalement perdu le minimum de classe que ma Harley se tue à me donner. Mais si ça te dit quand même je me disais, enfin, nos courses me manquent. Alors à l’occasion… »
Vaughn replaça ses lunettes sur son nez, décrochant un sourire amusé à la rousse.
« Je te botterai à nouveau le cul avec plaisir si tu y tiens tant, répondit-elle pour terminer sa phrase en suspend. »
Comme pour la punir de son affront et sa prétention, un dieu quelque part s'invita dans la conversation en soufflant au Son une envie d'olive. Il frôla la jeune femme dans son mouvement, déclenchant une décharge électrique qui la fit se taire. Son cœur tendu battit soudain plus fort. Sa peau la brûla tant elle réclama un autre contact. Il fallut quelques secondes à l'Irlandaise pour chasser de son esprit les images d'un avenir extrêmement proche qu'elle pourrait réaliser du bout des lèvres si elle le voulait. Et elle le voulait probablement. Un peu trop. Un peu trop vite, surtout.
Son palpitant emballé accepta difficilement de s'apaiser. Troublée, Llewyn reporta son attention sur les crudités plutôt que sur les orbes noirs du quadragénaire.
« Ne t'en fais pas, l'estime que j'ai de toi reste la même, avec ou sans talents de chef ! Tu as d'autres qualités indéniables qui compensent pour le moment. Et je suis sans doute aveuglée par le combo lunettes-blouson. Ça t'aide, sache-le. »
Elle croqua à son tour dans une olive puis se rinça le gosier d'un peu de vin rouge.
« Ça fait longtemps que tu le portes, d'ailleurs ? Le cuir. »
La curiosité était un vilain défaut sans doute partagé. On ne s'improvisait sûrement pas enquêteur sans ressentir l'envie de fourrer son nez partout, en toutes circonstances.
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❝Vaughn I. Dixon❞
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Llewyn exprime sa fausse déception pour le menu. Je hausse les épaules pour répondre à sa question en ce qui concerne les choix qui s'offrent à elle. En réalité, elle en a un autre : ne pas rester. Je ne vais certainement pas l'inciter en ce sens, bien trop ravi de l'avoir à ma table - malgré la piètre qualité gustative de cette dernière. J'ai misé sur les pizzas en espérant que son penchant pour cette gourmandise réputée soit aussi fort que la plupart des gens. Le sujet du repas mis de côté, j'affirme avoir envie de retrouver nos courses.
Pas pour le plaisir de me faire botter le cul comme l'irlandaise aime le souligner. Pas même pour l'espoir grisant d'un jour parvenir à la battre. C'est surtout pour le reste. Tout ce qu'impliquait notre rivalité sur le bitume. La vitesse, les bruits si séduisants de nos bécanes côte à côte. La sensation de sentir les gens, le décor et même la notion de réalité s'effacer devant la perfection de l'action. Je me demande parfois s'il y a quelque chose de plus pur que cette adrénaline. Les baisers amoureux peut être. Les bras de ma fille qui ne parviennent pas à m'encercler totalement. L'horizon magnifique depuis la fenêtre de mes parents, sur leur île. D'où vient LLewyn.
Notre compétition fait partie de ces rares émotions qui me passionnent. Faisait. En lui proposant de remettre le couvert, j'attends sans doute de voir si cette osmose n'est pas totalement perdue ;
« Je te botterai à nouveau le cul avec plaisir si tu y tiens tant, »
" J'y tiens. "
Dis-je avant de savourer l'olive tandis que la jeune femme se perd une fraction de seconde. J'appréhende un moment d'embarras - venu de je ne sais où - ces silences qui gâchent trop souvent les discussions entre deux personnes qui ne savent pas encore à quel niveau se situe leur entente. Leur relation. Leur sympathie. Mais la rousse-filante me revient vite et termine de me convaincre sur l'efficacité de mon combo lunettes-blouson. Dommage, la paire d'yeux ne sort généralement pas d'ici.
« Ça fait longtemps que tu le portes, d'ailleurs ? Le cuir. »
Je me replace sur le tabouret à ses côtés et effectue un léger calcul. En poussant cette porte sur mes débuts parmi les SAMCRO, je secoue pas mal de fantômes. Je prends une inspiration profonde, j'essaye de la maitriser, et retrouve ses beaux yeux clairs :
" Environ neuf ans. Je venais d'arriver sur Charming, à cause d'un contrat. Comme quoi le hasard ... "
Se mêle de chacune de mes relations. Je n'attire pas la chance ni ne la provoque. J'ai tendance à laisser couler. Ma seule véritable décision fut l'armée. Autant dire que j'en ai tiré peu de bons souvenirs. L'armée, et l'activité que j'exerce depuis mon renvoi. Puis le hasard a semé les rencontres importantes. Je souris à Llewyn.
" J'ai sympathisé avec l'un d'entre eux, Bill, avant d'intégrer rapidement le groupe. "
Je me vois mal évoquer Vera. Pas maintenant. Pas ici. Cette soirée est à nous et j'aimerai la préserver de tous les souvenirs pesants qui ternissent trop souvent mon humeur.
" Neuf ans ; je n'avais pas fait le compte ! T'as décidé de me torturer ce soir non ? "
Poing fermé, je viens placer mes phalanges ALYS sur son épaules pour mimer une bousculade vengeresse. Mais sa curiosité m'offre une ouverture. Après tout si je réponds - même sans développer - elle me doit la pareille.
" Et toi, ce sont Les Bithbeo qui t'ont fait venir à Charming ou c'est ici que tu les as rejoint ? "
Indiscrétion, appétence, fascination.
Tout se mélange alors que j'imagine à ses jolies tâches de rousseur un passé, des raisons, un foyer. Les dessins sur sa peau ébauchent autant d'intrigues et d'inconnus que je veux découvrir, savourer, qui ne me sont malheureusement pas lisibles sans que la rouquine m'aide à les traduire ; Je me penche lentement vers elle, sans franchir la limite de l'autre soir, juste assez pour retrouver son parfum et presque entendre son cœur battre.
Dis-moi le minimum ; Raconte-moi tout. Qu'importe où nous en sommes ; J'y ai pris goût.
HARLEY-
❝Llewyn Oswell❞
Messages : 267 Date d'inscription : 24/12/2019 Faceclaim : Polly Ellens Copyright : étangs noirs (ava) - frimelda (signa) Âge : 29 ans Aka : Oz Côté ♥ : Divorcée. Célibataire, donc. Métier : Transporteuse. Gang : Bithbeo
L’Américain reprit place à son tour, plongeant dans ses pensées et ses souvenirs pour - sans doute - retrouver la date clé de son entrée dans les rangs de SAMCRO. Une seconde de calcul mental plus tard, il livra :
« Environ neuf ans. Je venais d’arriver sur Charming, à cause d’un contrat. Comme quoi le hasard … J’ai sympathisé avec l’un d’entre eux, Bill, avant d’intégrer rapidement le groupe. »
Llewyn fronça légèrement les sourcils, tentant de retrouver dans les nombreuses rencontres faites parmi les motards si elle connaissait un Bill. Au même titre que leurs pairs irlandais, les Sons of Anarchy usaient souvent plus de pseudonymes que de leur nom réel, ce qui rendait la tâche plus complexe. Le trombinoscope de ses connaissances appartenant au groupe de bikers revu mentalement en long, en large et en travers, la jeune femme capitula, admettant pour elle-même ne pas associer ce prénom à un visage connu. À frayer avec ces grands gars au cuir orné d’une faucheuse, elle l’avait probablement déjà croisé, mais aucune présentation en bonne et due forme ne lui revenait à cet instant.
« Neuf ans ; je n’avais pas fait le compte ! T’as décidé de me torturer ce soir non ? »
Pour la châtier un peu de cette curiosité téméraire et un peu maladroite qui lui ajoutait des rides, Vaughn frappa doucement son épaule de son poing fermé. Grande actrice, la rouquine plaqua immédiatement sa paume sur son bras endolori en échappant une interjection de douleur bien trop marquée pour être réaliste.
« Moins de violence, qu’est-ce que j’y peux si tu es vieux ? »
Retourner le couteau dans la plaie ? Un concept inconnu. Llewyn était une telle metteuse de pieds dans le plat qu’elle se contentait généralement de retirer ledit couteau pour en enfoncer un autre à lame plus large.
La soirée était à l’humour, à la légèreté, autant en profiter. Vaughn ne pouvais s’offusquer plus qu’il ne l’avait déjà été des trois ans en trop qu’elle avait gravés sur son visage. Ce devait être les lunettes. Ces fichues binocles lui donnaient un air sérieux, sage, séducteur.
« Et toi, ce sont les Bithbeo qui t’ont fait venir à Charming ou c’est ici que tu les as rejoint ? »
Llewyn échappa un sifflement contrit. Elle fit tourner le verre de vin entre ses doigts, imposant à la tige une légère torsion circulaire pour le faire danser sur la table.
« Je ne peux pas vraiment en parler, tu sais … On est ce type de grande, elle mima des guillemets, famille qui n’accepte pas qu’un étranger découvre nos petits secrets. Je devrais techniquement te faire taire après mes révélations, et ça m’emmerderait passablement. »
Le sourire taquin et le ton désinvolte dont elle faisait usage suffiraient largement à convaincre Vaughn qu’elle plaisantait. Jamais l’Irlandaise n’avait eu à coudre les lèvres de qui que ce soit pour s’assurer son silence à coups de 9mm. Le Jericho qu’elle emportait avec elle lors de missions n’était finalement qu’un accessoire décoratif. Les rares balles jamais crachées avaient trouvé cible plus intéressante dans le mobilier urbain ou les murs que dans la chair trop vite percée d’un homme qui n’aurait pas dû voir ou entendre ce qu’il avait surpris. Elle se satisfaisait de cette situation. Pleinement, en réalité. Si dévouée à la cause qu’elle pouvait l’être, si déterminée qu’elle se montrait par moments, Llewyn n’était pas prête à franchir cette ligne-là. On ne se relevait pas réellement d’une vie arrachée, pas vrai ? On pouvait composer avec tout : une mère qui n’en était pas une, un père au goût de courant d’air, une enfance décomposée, un gamin abandonné, un mariage raté, un frère emprisonné pour le bien de tous, un autre mis en bière pour n’avoir été qu’un gosse idiot, un dernier qui n’avait plus dans le regard qu’il vous portait que de la rancoeur, une soeur brisée qui se reconstruisait seulement. On dormait encore, même les épaules lestées par la certitude d’être du mauvais côté de la loi - bancale comme elle était - ; même le coeur lourd de haine, de hargne, aigri d’intolérance. Mais priver quelqu’un de son souffle .... Qu’importe la force mentale déployée par la jeune femme durant toutes ces années, elle savait, sentait, que les murs en ruines qui menaçaient jour après jour de s’écrouler éclateraient à franchir cette limite.
Et on ne rebâtissait pas de hautes murailles sur un tas de graviers.
« C’est moi qui ai demandé un transfert depuis Belfast, en réalité. Mon vieux en était … elle tiqua, se corrigea immédiatement puisqu’il n’était mort que pour elle : en est, les frangins ont suivi le mouvement … C’est un peu une tradition, tu vois ? Dans certaines familles on transmet la passion du sport ou de la musique, nous on a pris le patriotisme poussé à l’extrême. Elle se fendit d’une expiration amusée et ponctua sa phrase d’une gorgée de vin. J’ai fini par me lasser de mon petit coin de pays. On m’a vendu le rêve américain, Charming, la Californie, et voilà ! Un aller simple plus tard, on jouait les immigrés comme nos ancêtres avant nous. »
Les circonstances réelles de son départ, Llewyn préférait les garder pour elle. Rien ne servait de plomber l’atmosphère en révélant l’une de ces histoires familiales dramatiques, comme on en trouvait cent-mille autres. Elle croqua finalement dans une lamelle de carotte pour déglutir la boule de tension qui lui tenait la gorge.
Pour dissiper l'appréhension qui lui mordit la nuque, l'expatriée continua son interrogatoire :
« Tu étais où, avant Charming ? »
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❝Vaughn I. Dixon❞
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« Moins de violence, qu’est-ce que j’y peux si tu es vieux ? »
Tant de comédie entre ses jolies lèvres, qu'elle feigne la douleur ou mes trop nombreuses années. L'exagération et le sarcasme lui vont bien. Bon perdant, je récupère mon poing fautif en ouvrant les paumes dans une déclaration muette d'excuse, à défaut d'innocence. Moins de violence ne veut pas dire aucune et je garde secrètes les idées de démonstrations suggestives qui me viennent à l'esprit ; la violence peut prendre bien des formes et engendrer tant de maux différents.
Mon cœur d'ancien se serre sans douleur cette fois et je souris à la jeune irlandaise.
Au milieu de ces taquineries s'immiscent un peu de nos vies. Ce fut étrange d'évoquer William devant Llewyn et attendre qu'elle articule à son tour des prénoms et autres détails de son quotidien retient absolument toute mon attention ; Bien sûr, dans ce contexte étrange, la prudence est de mise. J'imagine mal la rouquine me déballer sa biographie. Je n'en veux pas je crois, pas si facilement. Les histoires sont toujours chargées de blessures, de victoires, d'obstacles et de regrets. La patience est encore la meilleure façon d'apprendre connaître quelqu'un qu'on apprécie.
« [...] Je devrais techniquement te faire taire après mes révélations, et ça m’emmerderait passablement. »
" Et moi donc. "
Je vide le verre de vin et fais descendre par la même occasion les drôles d'illustrations engendrées par ses mots. Llewyn est peut être armée. Non pas maintenant, ça m'étonnerait ... mais dans le cadre de ses activités ? Très certainement. Je n'aime pas la vision offerte, mais elle a quelque chose de rassurant. C'est évident : elle prend parfois des risques. D'un mouvement de tête je chasse néanmoins l'idée. Je ne suis pas personnellement inquiet - et si le voisin me retrouve demain avec deux trous dans le buste il sera trop tard pour revoir mon jugement sur elle - mais je n'aime pas envisager qu'elle puisse tuer.
Manier les armes n'est pas ma spécialité. Pourtant j'ai été soldat pendant une demie décennie et faire feu ne s'oublie pas. Je sais encore comment vibre mon arme lorsque la culasse éjectée reprend sa place. Je sais le bruit de l'explosion de la composition fulminante, je connais les dégâts causés dans la chair humaine. Rien de ces souvenirs ne convient à ma vision de Llewyn.
A ma surprise, cette dernière ne reste pas entièrement fermée sur les raisons qui l'ont emmenées ici. Je l'écoute attentivement, imaginant à tort la silhouette massive d'un père fort et présent, qui voit ses enfants s'en aller vers le nouveau continent. J'invente des au-revoir compliqués, une atmosphère pesante sous un ciel nuageux ; Celle à qui j'aurai vraiment donné vingt-quatre ou vingt-cinq ans lorsqu'elle a retiré son casque la première fois prend subitement quelques années. Trois ou quatre, juste assez pour la sortir définitivement de l'ambiance puérile auxquels certains s'agrippent passé la majorité. Ses yeux clairs s'assombrissent et je m'oblige à ne pas tant les fixer. Il se pourrait en réalité que la rousse-filante soit adulte depuis bien plus longtemps.
« Tu étais où, avant Charming ? »
" Attends ; je conçois l'idée de protéger les secrets de famille mais tu vis ici avec tes frangins ? Tu en as combien ? "
C'est incongru mais ils ont été évoqués, elle peut certainement en dire plus. J'attrape un légume à croquer au passage, par besoin de me rappeler à quel point la soirée doit rester insouciante, détachée, banale. Même si c'est improbable.
" J'ai longtemps vécu près de Los Angeles, j'ai aussi passé près de deux ans en Équateur. "
J'ai été affecté dans plusieurs bases militaires au quatre coins du pays puis, avant d'être renvoyé, j'ai fait deux longs passages en Amérique du Sud. Servir sous les drapeaux ne m'a jamais permis de dépasser les océans. Il a fallut que ma mère souhaite retrouver ses racines, il y a une poignée d'années, pour que je découvre la magnifique Irlande.
" Finalement c'est à Charming que je me sens chez moi. Je crois. "
Malgré tout ce que j'ai pu bâtir ici, la ville, le QG des Sons, ni même l'appartement ne me permettent la chaleur d'un foyer. Le climat rassurant d'un nid, de présences régénératrices. Ces plaisirs ont disparu. Je me frotte nerveusement les mains et tente d'attraper de quoi occuper mes lèvres, rencontrant les doigts de Llewyn sur le passage des miens.
" Et du coup, le rêve américain ? "
Est-elle déçue, comme beaucoup de ces touristes qui pensent échapper à la réalité en franchissant les frontières ? Sa fratrie a-t-elle trouvé ici un équilibre ? Ont-ils pu se protéger de ce qu'ils fuyaient ou atteindre les objectifs donnés ? Je me demande si leur père tient les comptes depuis Belfast. S'ils font tous partie des Bithbeo ou si au contraire l'implication de la demoiselle est un secret pour sa famille. Ce qu'elle a dit laisse penser qu'ils sont très soudés, qu'ils partagent tout ; jusqu'à l'illégalité ?
" S'cuse je ne pose pas tant de questions normalement. Disons que je suis payé pour dénicher certaines réponses... Je propose qu'avant de me mettre une balle entre les yeux tu me fasses signe, quand je deviens indiscret. "
Je lui envoi un clin d’œil amplifié en quittant une nouvelle fois mon siège. Je me dirige de l'autre côté de la pièce pour retirer de la platine l'album de jazz terminé et le remplacer dans la foulée. Cette légère distance me fait prendre du recul, assez pour mieux réaliser sa présence. J'éteins la pièce du fond en glissant la main dans le couloir désormais obscur et reviens à sa hauteur pour allumer la lumière suffisante du bar. Où en étions-nous ?
HARLEY-
❝Llewyn Oswell❞
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On imposa un retour arrière pour rebondir sur certains détails trop vite livrés par l'Irlandaise.
« Attends ; je conçois l'idée de protéger les secrets de famille mais tu vis ici avec tes frangins ? Tu en as combien ? - Une sœur et un frère à Charming, le dernier est encore en Irlande. »
Trois. Comme s'il suffisait de ne pas mentionner le quatrième pour oublier les dates désastreuses gravées sur la pierre tombale qui s'était refermée sur lui. Llewyn n'évoquait que rarement Rhys. Jamais, en réalité, pas en dehors du cadre familial - mais même là, le sujet était souvent évité. Il lui semblait parfois que quelqu'un avait relié le prénom de son frère à un bouton rouge et menaçant. Chaque fois qu'on l'enfonçait, il allongeait désespérément le temps et plombait les paupières de larmes lourdes et fatiguées. Les Oswell s'étaient silencieusement convenus de taire ces foutues quatre lettres qui leur faisaient si mal. Ou plutôt, on avait accepté de ne pas les articuler en présence de l'aînée de la fratrie. Les autres cuvaient leur deuil comme ils l'entendaient.
Contenté du maigre récit de son invitée, l'Américain accepta de livrer quelques informations de plus sur sa propre vie :
« J'ai longtemps vécu près de Los Angeles, j'ai aussi passé près de deux ans en Équateur. Finalement c'est à Charming que je me sens chez moi. Je crois. »
Les paysages devaient être bien différents dans ces trois coins du globe. Los Angeles : l'agitation constante, le grouillement incessant du monde, l'énergie brutale qui se dégageait des métropoles et rayonnait sur des kilomètres à la ronde. La vie devait être bien différente lorsqu'on approchait la plus grande ville de l'État. Charming, en comparaison, passait sûrement pour un village de campagne. Mais ces endroits-là ne devaient pas tant changer que l'Amérique du Sud. Qu'y avait-il à faire en Équateur pour un enquêteur ? Llewyn essaya tout son saoul de rassembler les rares connaissances de ce pays qui traînaient quelque part dans sa mémoire mais n'y parvint qu'à moitié. Elle ne connaissait rien de cet endroit-là, ne savait pas la capitale, les autres grandes villes, les spécialités culinaires. C'était tout juste si elle pouvait replacer les frontières sur une carte.
Il chaparda un en-cas, et la pulpe de ses doigts passa furtivement sur ceux de l'expatriée qui se sentit une fois de plus frappée par le tonnerre. Elle retint brièvement son souffle, retenant l'envie de retirer sa main qu'elle sentait comme léchée par des flammes. Elle récupéra finalement une chips, une gorgée de pinard, le regard de son hôte.
« Et du coup, le rêve américain ? S'cuse je ne pose pas tant de questions normalement. Je propose qu'avant de me mettre une balle entre les yeux tu me fasses signe, quand je deviens indiscret. - Tu essaies de me faire croire qu'avec ton boulot tu ne passes pas ta vie à interroger les gens ? Elle arqua un sourcil dubitatif avant de hausser les épaules. C'est … ça pourrait être pire ? »
Llewyn releva ses manches à mi-bras et glissa son coude dénudé sur la table. Doucement, comme pour ne pas brusquer les souvenirs gardés depuis son arrivée sur le sol américain, elle appuya sa tempe gauche contre son poing fermé, son buste basculant un peu plus vers lesm quadragénaire. Était-ce vraiment le moment propice au bilan de quatre années de vie ? Elle n'avait pas, jusqu'à présent, pris pleinement le temps de réfléchir aux quarante-huit mois écoulés depuis leur départ de Belfast. Il y avait du mieux, c'était certain : Siobhan était à deux doigts de décrocher son diplôme de fin d'études, on la surprenait parfois même à sourire comme avant ; Tadgh ne risquait plus inconsciemment sa vie jour après jour, ses réflexes inconscients qui le poussaient au suicide volontaire s'étaient tus lorsqu'on l'avait éloigné de Short Strand. En tous cas, il ne risquait plus de rencontrer un protestant qui lui rabattrait le caquet en l'abattant. Quant à Ailbhe, il ne faudrait certainement plus très longtemps pour qu'il soit enfin libre de quitter l'Île d'émeraude.
« Non, c'est pas trop mal en réalité ! Une fois habitués au soleil cuisant, aux tremblements de terre et à votre tempérament un peu … Elle braqua ses prunelles sur Vaughn pour s'assurer qu'il ne se braquait pas : lent ? Ça va mieux. Vous avez juste cette manie terrible de mettre de l'avocat partout. Je veux dire, vraiment partout ! »
La jeune femme s'étonnait d'ailleurs de ne pas en voir sur le plateau de crudités proposé par le motard. Il ne la frappait pas vraiment comme l'un de ces Californiens amateurs de chair verte qui ne jurait plus que par elle. Étonnamment, Llewyn n'imaginait aucun des Sons of Anarchy tenir une alimentation saine - quoiqu'insupportablement clichée. C'était comme d'imaginer un Irlandais se nourrir d'autre chose que de bière et de whiskey. Les stéréotypes n'avaient la vie dure que parce qu'ils étaient parfois trop vrais pour être effacés.
« Qu'est-ce que tu faisais en Équateur ? »
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❝Vaughn I. Dixon❞
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Quatre enfants, les trois-quart si loin du paternel. J'imagine trois autres roux et m'en amuse. Les parents de cette fratrie ne se dessinent pas clairement dans mes pensées, ils en ont forcément, mais le quatuor forme à lui seul une famille complète et soudée. Pourquoi l'un d'entre eux est-il resté là-bas ? Pour s'occuper des vieux ? Pour ne pas déraciner l'intégralité de la famille ? Je me trompe très certainement et le mystère reste entier au sujet des Oswell. Mais je sais que Llewyn a des proches ici à Charming, c'est loin d'être un élément négligeable.
Les Irlandais dans le coin ne sont pas une denrée très rare mais je me demande toujours pourquoi ils sont venus dans ce coin du monde. Certes les États-Unis font du bruit et le bruit a toujours attiré ; ma propre mère y a posé ses valises avec son premier conjoint avec cette légendaire idée de rêve amerloque. Si je n'ai jamais trouvé cette tentative logique, j'ai parfaitement compris son souhait de retourner dans son pays natal dès qu'elle a pu convaincre mon ancien. Elle s'est rendu compte qu'il n'y a rien de plus ici. Les choses sont juste différentes, les gens aussi. C'est sans doute l'envie de changement qui pousse la plupart des immigrés loin de chez eux.
Ce n'est pas le cas de la rousse filante. Le terme transfert utilisé me fait complètement saisir la notion professionnelle du déplacement, l'implication sous-entendue.
« Tu essaies de me faire croire qu'avec ton boulot tu ne passes pas ta vie à interroger les gens ? [...] C'est … ça pourrait être pire ? »
" Je vois... Et non, je ne passe pas ma vie à interroger les gens ! Je ne suis pas flic. "
C'est peut être aussi un cliché. A part les enquêteurs de la police judiciaire, les bleus ont probablement d'autres choses à foutre que des interrogatoires. Quant à moi, je récupère l'essentielle de mes informations sans adresser la parole aux concernés ; c'est un autre exercice.
Son rapide bilan sur sa vie américaine n'est pas ultra positif mais sans avoir accès aux détails, difficile de se faire une idée précise de ce que Llewyn exprime. Il y a toujours pire, dit-on. Comme si elle se montrait soudain indulgente face à mon intérêt frustré, elle justifie son avis avec plusieurs points.
" Tempérament lent ? Dis-le franchement, la moitié des gens sont cons. Mais c'est le cas partout sur le globe j'en ai bien peur. "
Un rire blasé s'échappent d'entre mes lèvres auxquelles je ramène un bout de légume. L’Équateur revient sur le tapis et je prends le temps de nous resservir à boire si besoin avant de répondre.
" J'étais militaire. Et pour être honnête, on ne faisait rien de très intéressant là-bas... "
S'imposer sur le territoire, montrer la présence de notre "suprême" Armée, appliquer les décisions du bel État contre l'opinion publique. Déloger divers terroristes pourtant héros du peuple, supporter quelques attaques et riposter sous les ordres d'alcoolos tyrans. Protéger des orphelinats, soutenir une poignée d'associations aléatoirement et décréter le reste d'entre elles comme dangereux regroupements ; Obéir à des ordres douteux, risquer quotidiennement sa vie dans des conditions relativement précaires : rien de passionnant.
" J'ai porté le treillis cinq années seulement. Ce métier n'était pas pour moi. "
Mon regard glisse sur son bras tatoué, de haut en bas, revient aux peintures de ses doigts que je commence à connaître. Il ne faudrait pas que je me laisse à nouveau envoûter par ces symboles sombres qui dansent sur sa peau claire. Je retire mes lunettes pour passer une main sur mes yeux, rompre le sortilège, et récupérer ses orbes sans dévier :
" J'ai été renvoyé pour insubordination si tu veux tout savoir. Depuis je porte des lunettes de temps en temps, j'ai l'air moins insolent. "
J'affiche un large sourire charmeur et dépose l'accessoire coupable sur un meuble un peu plus loin. J'étais jeune et forcément plus stupide, en tout cas impulsif. Je n'ai jamais regretté ce renvoi qui m'a permis de vivre la meilleure partie de mon existence ;
" ... à part l'avocat et le caractère des américains, il y a d'autres choses que tu n'aimes pas ? "
Pourquoi ne pas lui demander ce qu'elle apprécie ? C'est moins drôle. Et puis souvent un recto implicite le verso. Puisque je fais malheureusement partie des tempéraments désagréables, je suis prêts à entendre le reste. Je ne cesse de sourire, plaçant mon coude en face du sien dans une pose contemplative assumée.
HARLEY-
❝Llewyn Oswell❞
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Ce pays n’était pas la première destination à laquelle on pensait lorsqu’on souhaitait voir quelle était la couleur de l’herbe, ailleurs. L’Amérique du Sud, c’était le Brésil, le Pérou pourquoi pas. L’Argentine lorsqu’on était Allemand et qu’on avait quelque chose à se reprocher. Du reste, les destinations paradisiaques se trouvaient un peu plus au nord : le Costa Rica et ses facilités fiscales, les îles à couper le souffle des Caraïbes, le Mexique, si proche de la Californie.
Vaughn, avant de confesser les raisons de son exil en Équateur, s’arrêta sur ses compatriotes américains pour souligner leur connerie pure et simple, proche de celle d’une bonne moitié des autres habitants de la planète. L’Irlandaise haussa les épaules ; il prêchait une convaincue. Restait à savoir de quel côté de la limite ils se trouvaient tous les deux. Quand elle se comparait à certains autochtones, qu’ils viennent de Charming, de Los Angeles ou de Sacramento, Llewyn se trouvait bien heureuse d’être plus vive d’esprit. Qu’on la place à côté de son aîné, et le résultat n’était plus le même. Mais elle ne parlait pas tant de capacités intellectuelles que de vitesse d’exécution réelle. Les Californiens prenaient leur temps. Partout, pour tout. Ils traînaient, faisaient s’allonger les secondes, profitaient de la vie sans réaliser à quel point elle était courte, et qu’il n’y avait pas une minute à perdre.
« J’étais militaire. Et pour être honnête, on ne faisait rien de très intéressant là-bas… »
L’indiscrétion de l’expatriée éclata en une foule de questions. Les interrogations fusèrent dans son esprit, et elle dut se réfreiner pour ne pas assommer immédiatement son interlocuteur. Sage, muette, elle attendit la suite des confessions de celui qui avait servi sous la bannière étoilée.
« J’ai porté le treillis cinq années seulement. Ce métier n’était pas pour moi, conclua-t-il sans autre forme de procès en retirant sa seconde paire d’yeux. J’ai été renvoyé pour insubordination si tu veux tout savoir. Depuis je porte des lunettes de temps en temps, j’ai l’air moins insolent. - L’air, seulement, mhm ? »
Elle eut un sourire amusé en réponse au sien, bien plus séducteur. C’était donc de là qu’il tenait le zèle dont il avait fait preuve en détruisant à coups de batte de baseball le pare-brise d’un employeur ?
Sans décrocher son regard, Vaughn s’approcha à peine pour demander :
« ... à part l'avocat et le caractère des américains, il y a d'autres choses que tu n'aimes pas ? »
La liste risquait d'être longue, la jeune femme n'aurait pas assez d'une soirée pour livrer tous les petits défauts plus ou moins supportables trouvés à sa terre d'accueil. La perspective d'entamer l'énumération avait cependant cela d'intéressant : elle forcerait une nouvelle rencontre en privé. Llewyn inclina légèrement la tête, les sourcils froncés de concentration, ses yeux accrochés à ceux du brun, comme s’il lui était impossible de s’en défaire. Elle trempa ses lèvres dans le liquide carmin pour se laisser un temps de réflexion et rafraîchir ses idées qui s'embrasaient sous le regard brûlant du quadragénaire. Lorsqu'enfin elle trouva la réponse idéale, elle clappa sa langue contre son palais, reposa le rouge sur le bar et esquissa un sourire vaporeux.
« Je n'aime pas la manière dont tu me regardes, là, de suite. Ça me donne l'impression que tu vas tenter quelque chose de stupide … »
Sa voix rayée retrouva le rien de mutin qu'il lui connaissait sans doute déjà trop. Pour se soustraire aux orbes noires de son hôte, Llewyn reporta enfin son attention sur les lippes masculines quand les siennes s'étiraient davantage. Elle laissa flotter une seconde, puis une autre, une dernière. Doucement, la transporteuse se redressa et pivota sur son assise en éloignant un peu son verre. Ses jambes croisées pointées vers l’Américain, elle se pencha légèrement pour amoindrir la distance déjà trop courte entre eux et planter un regard défiant dans le sien.
« Tu vas essayer de m'embrasser à nouveau, Vaughn ? »
Ils en étaient à leur deuxième verre, c’était signe d’amélioration. Et cependant, le compte n’était pas encore suffisant. S’il subsitait le moindre doute dans l’esprit de la rouquine, il fut brusquement chassé par un sursaut du tourne-disque. La voix envoûtante d’un saxophone s’enraya, les notes de jazz s’entrechoquèrent, le diamant achopa entre les sillons du vinyle.
Llewyn s’arracha à contrecœur à cette proximité oppressante qui ne demandait qu’à être anéantie une bonne fois pour toutes. Elle eut un peu froid en s’éloignant de Vaughn pour traverser le salon et rejoindre la platine toussotante. Le premier interrupteur venu claqua sous ses doigts, la lumière l’aveugla légèrement, elle battit des cils pour accomoder en arrivant devant l’instrument qui peinait. Avec une infime précaution, l’Irlandaise releva le bras de lecture et stoppa les tours incessants du disque pour le récupérer et le ranger dans son carton d’origine. Elle s’accroupit devant la bibliothèque musicale, replaça au hasard le trente-trois tours entre deux albums de jazz et parcourut nonchalamment les différents titres qui s’offraient à elle. Ses traits s’illuminèrent quand ses doigts tombèrent sur une pochette blanche fendue de deux protagonistes reconnaissables entre mille.
Elle se redressa dans un craquement d’articulations, sortit le disque et le plaça délicatement sur la platine. Un coup de brosse magnétique plus tard, les enceintes crachaient doucement les premières notes de Second Hand News tandis qu’elle reposait la pochette de ce qui était - à son sens - la plus belle réussite des Fleetwood Mac sur le meuble attenant l’étagère à vinyles. Ses prunelles grises contemplèrent une seconde le trente-trois tours dans son tourbillon avant d’être attirées vers la droite.
Les deux cadres qui tenaient là, rare décoration, déroulaient des instants de la vie de Vaughn. Llewyn, habituellement si curieuse, se sentit brusquement forcée dans un moule d’indiscrétion qui lui souleva le cœur une fraction de seconde. Elle détourna le regard, honteuse, le reportant sur la pochette de Rumours. Les lèvres pincées, elle chassa dans une expiration silencieuse les scénarios qui s’imposèrent dans ses pensées. Il n’était pas marié, pas vrai ? Il n’y avait pas d’alliance à son doigt. Plus ? Depuis quand ? Les souvenirs de leur avant-dernière conversation lui revinrent en pleine gueule. Alys, les grands-parents. Les quatre autres lettres tatouées sur les phalanges opposées. Le gamin sur ces photos. Une main glacée tordit les entrailles de l’Irlandaise qui s’imaginait déjà le pire.
Elle grima son visage constellé de taches de rousseur d’un sourire pour masquer son trouble en se retournant.
« Dix-neuf-cent soixante-dix-sept. Une bonne année ! »
Elle agita doucement le carton vide sur lequel figuraient Mick Fleetwood et Stevie Nicks, espérant que l'air battu suffirait à dissiper tous ses doutes. Ils avaient tous leur vie, leur passé. Elle la première. L'annulaire gauche et la cicatrice qui crevait son ventre n’étaient que les deux preuves les plus visibles des bagages traînés par l’expatriée.
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❝Vaughn I. Dixon❞
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L'air moins insolent derrière la paire de verres, c'est une simple supposition. L'adage prétend que les porteurs de lunettes sont ceux qui se perdent dans les bouquins, les chercheurs, les intellos, les cerveaux. J'aime lire et respecte le Livre sous toutes ses formes, mais je n'ai jamais été un squatteur de bibliothèques ; le sport, l'armée et la moto m'ont pris plus de neurones que l'inverse. Je continue de lui sourire, maitrisant cet art bien moins exigeant en heures de pratique et accessible à tous. J'apprécie le côté aléatoire du charme ; on plait ou non. Et c'est bien indépendant de la volonté et des dizaines d'efforts tentés.
Elle me plait, l'irlandaise, et je ne peux afficher un sourire trop commun, habituel, face à elle. Devant ses yeux clairs et son timbre de voix si joliment érayé, mes lèvres tracent naturellement un rictus séduit et engageant.
« Je n'aime pas la manière dont tu me regardes, là, de suite. Ça me donne l'impression que tu vas tenter quelque chose de stupide … »
" Je t'ai laissé une si mauvaise impression ? "
Llewyn a probablement la réponse à sa propre question : moins insolent, l'air seulement. Malgré tout les aventures réservées par la vie m'ont aidé à canaliser cet ensemble d'impulsions ; la répartie trop aiguisée, la gourmandise, le jeu. Les années aident à affiner certaines facettes, mais on ne change jamais vraiment. J'ai des plaies et de nouvelles compétences, les richesses de l'expérience. Ça n'enlève pas le tempérament initial. J'étais un sale gosse, honnête, débrouillard et provocateur. Je ne vois pas ce qui a changé.
« Tu vas essayer de m'embrasser à nouveau, Vaughn ? »
Je doute qu'une nouvelle tentative soit possible. Je n'essaierai pas. Je ferai ; Mais pas ce soir. Si l'envie est plus présente que la dernière fois, j'ai retenu la leçon. Elle me plait, la réciproque reste floue. Elle est ici, la rouquine, elle a proposé, l'expatriée. C'est elle, à l'instant, qui évoque une telle proximité entre nous lèvres avides et c'est dans son regard que je crois deviner l'appétit ;
Je me contente de hausser un sourcil pour laisser planer le doute dans une mimique ambigüe. Et si j'essayais ? Mes orbes noires se perdent alors sur le tracé de sa bouche. J'imagine dangereusement l'effet contre mes lippes, nos respirations mêlées, les paupières closes pour uniquement savourer le touché, puis sa peau lisse sur ma barbe effrontée. Nos bustes accolés, mes mains aventurières pour faire tomber d'autres barrières ;
Lorsqu'elle a retiré son casque la première fois, un jeu s'est terminé. On a saisit de nouveaux dés.
Le fond musical déraille pour imiter mes pensées. Je me redresse furtivement tandis que la jeune femme s'éloigne. Il n'y a pas cet élan, cette fuite comparable à l'autre soir. Mais quand-même, elle s'échappe. Mes murs la retiennent et je profite de sa silhouette au milieu de ma vie. Je m'habitue, finalement. Prêts à articuler n'importe quelle connerie pour reprendre la distance nécessaire, je reste muet, les photos que Llewyn aperçoit depuis le bout de la pièce me reviennent en mémoire. La rousse-filante au milieu me dérange - je ne veux pas évoquer ma famille de crainte de tout briser. Même si ce serait peut être un soulagement.
« Dix-neuf-cent soixante-dix-sept. Une bonne année ! »
Je me racle la gorge et la remercie intérieurement de briser le silence ;
" Tu n'as pas idée ! "
Avant qu'elle ne revienne près du bar, je la rejoins, bouffant cet espace bénéfique quelques secondes, qui commence à devenir douloureux. Je plonge les mains dans mes poches pour les retenir, toujours, et effectue un mouvement du visage pour désigner ses tatouages que je n'avais pas eu le loisir d'admirer avant ce soir.
" Je n'essaierai pas de t'embrasser, je ne veux pas te voir partir déjà. Je ne te demanderai pas non plus de voir les autres ; "
Amusé, je tente de ne pas sourire trop largement. J'aurai mieux fait de conserver les lunettes sur mon nez. Tant pis, je continue, suffisamment proche de Llewyn pour inspirer son parfum délicieux et me noyer un peu plus dans ses beaux yeux.
" Mais ; tu m'expliques ceux que je vois ? Ou tu as vraiment laissé carte blanche au tatoueur ? "
Éventuellement, elle n'a rien à dire sur ces dessins. Rien qui me concerne.
Je relève ma manche droite et dévoile le flingue à barillets à l'intérieur de mon avant bras. D'environ quinze centimètres sur dix, cette arme est l'héritage d'une camaraderie futile avec des fusiliers. Une de ses bêtises de jeunesse que j'affectionne.
" Tu vois, les miens sont pour la plupart d'une violente inutilité ! "
HARLEY-
❝Llewyn Oswell❞
Messages : 267 Date d'inscription : 24/12/2019 Faceclaim : Polly Ellens Copyright : étangs noirs (ava) - frimelda (signa) Âge : 29 ans Aka : Oz Côté ♥ : Divorcée. Célibataire, donc. Métier : Transporteuse. Gang : Bithbeo
Le temps égraina une ou deux longues secondes qui eurent un goût d’éternité. Est-ce qu’il avait vu sa tête se tourner légèrement vers les deux cadres ? Est-ce qu’il avait compris qu’une vague titanesque de questions s’était abattue dans l’esprit de son invitée ? Elle ne lui demanderait pas de se justifier, n’aurait pas l’indiscrétion de chercher à mettre un nom sur les visages imprimés sur le papier photographique, ou pire encore, de vouloir analyser la relation qui liait encore l’Américain à la mère de ses gamins.
Comme pour venir à son secours et la tirer de ces pensées, Vaughn s’éclaircit la voix et confessa :
« Tu n’as pas idée ! »
Les lippes tachées de l’Irlandaise s’étirèrent légèrement alors qu’elle se désaxait pour reposer la pochette de l’album. Doucement et prenant garde à ne pas toucher la platine, elle prit appui sur le meuble derrière elle en attendant que le Son la rejoigne dans le salon. La sale manie qu’il avait de toujours être trop proche, mais jamais réellement assez, laissa une nouvelle fois une sensation amère à l’expatriée. Les mains dans le dos quand celles de son interlocuteur étaient enfoncées dans ses poches, elle s’amusa à laisser courir la pulpe de ses doigts sur le bois de la bibliothèque pour s’occuper. Pour ne pas leur donner le loisir de désirer autre chose. Finalement, elle croisa les bras sous sa poitrine.
« Je n’essaierai pas de t’embrasser, je ne veux pas te voir partir déjà. Je ne te demanderai pas non plus de voir les autres. - Quelle galanterie ! J’apprécie, mentit-elle. »
Llewyn n’était pas certaine de réussir à s’échapper encore s’il tentait quoi que ce soit. Ou plutôt, elle n’était pas sûre de le vouloir. Elle ne pouvait nier être sensible à ses sourires charmeurs, à ses grands yeux noirs qui la transperçaient de part en part, au poids de ses regards lorsqu’ils se perdaient sur ses éphélides ou sur ses lèvres. La proximité du quadragénaire embrasait quelque peu ses sens, tordait sa peau qui réclamait un contact, faisait divaguer son esprit. Elle ne voulait pourtant pas s’emballer. Plus. La rouquine avait suffisamment donné par le passé. Amoureuse de la moindre affection, de la simple sensation de pouvoir tenir une relation stable pour compenser le modèle sentimental bancal de Cian et Vina, elle se précipitait d’ordinaire et fonçait tête baissée. Il suffisait d’un rien pour qu’elle s’allume. D’un rire séducteur, d’un baiser volé, d’une caresse suggestive. D’une promesse, d’un simple mot, même. Aujourd’hui plus que jamais, elle avait besoin de freiner son palpitant malmené. Il y avait bien longtemps que la raison ne l’avait pas emporté sur l’habitude. À bien y réfléchir, Llewyn n’avait même pas souvenir d’avoir jamais été si prévenante. Mais elle était éreintée d’être ce genre de filles : celles qui sautaient dans le vide sans parachute. Celles qui espéraient qu’une relation pourrait défaire les nœuds que d’autres avaient laissés.
« Mais ; tu m’expliques ceux que je vois, demanda Vaughn en considérant l’encre sur ses avant-bras. Ou tu as vraiment laissé carte blanche au tatoueur ? »
La jeune femme haussa mollement les épaules. Fallait-il que chaque dessin ait un symbole particulier ? Elle aimait mieux mentir quand on lui demandait, dire qu’elle n’était qu’une toile sur laquelle un artiste ou un autre avait couché ses idées. Les esquisses étaient laissées libres à l’interprétation, chacun y voyait et y comprenait ce qui lui plaisait le plus. C’était bien plus facile ainsi. Ses tatouages étaient trop personnels pour qu’elle ait envie de livrer leur histoire à un inconnu. Certains motifs étaient uniquement décoratifs : les mandalas qui dévoraient son bras gauche jusqu’au-dessus du coude étaient de ceux-là. Puis il y avait les autres. Ceux qu’elle avait longuement réfléchi. Ceux qui avaient un sens qui n’appartenait qu’à elle et qui se découvrait un peu quand on la connaissait. Vaughn parviendrait peut-être à les déchiffrer un jour. Elle n'avait rien contre.
En attendant cet avenir chimérique, le brun releva sa manche pour offrir à l’expatriée le loisir de contempler l’un de ses tatouages.
« Tu vois, les miens sont pour la plupart d’une violente inutilité ! - Ne sois pas si dur avec eux … »
D’autant qu’il les avait certainement voulus, à un moment ou un autre. Est-ce qu’il regrettait aujourd’hui le passage des aiguilles pour foncer son derme ?
Llewyn ne lui posa pas immédiatement la question. Elle se redressa dans un sursaut, quitta son appui et contourna légèrement le quadragénaire pour fendre le salon et retourner à la cuisine. Elle attrapa leurs verres et, dans un geste souple maintes fois effectué, retira ses Dr Martens en se servant de ses pieds seuls. La rousse revint sur ses pas dès qu’elle fut libérée de ses chaussures puis se laissa choir sur le canapé. Elle fit glisser le vin de son hôte sur la table basse tout en portant le sien à ses lèvres. Doucement, l’Irlandaise replia une jambe sous ses fesses quand l’autre touchait encore le sol.
« Laisse-moi deviner : tu étais complètement torché quand tu l’as fait, lança-t-elle à son interlocuteur qui prenait place à ses côtés. »
Sans vraiment lui laisser le temps de s’y opposer, la transporteuse attrapa sans le brusquer le bras du motard. Elle se pencha légèrement pour apprécier plus en détails l’encre qui marquait sa peau, tentant de faire abstraction de la vague de chaleur que ce simple contact imposait à son corps. Délicatement, comme par crainte de l’effacer, elle promena son pouce sur le pistolet. Si elle n’était pas bien sensible à ce genre de réalisation, elle pouvait cependant concéder à l’artiste un travail net.
Ses doigts la brûlèrent rapidement, et elle rendit son membre à son interlocuteur en lâchant :
« Point positif, le tatoueur n’avait pas la tremblote, c’est propre ! Elle s’abreuva d’une lampée de rouge avant de poser son verre. C’est quoi, ton amour des westerns ? Le signe de ton adhésion à la NRA ? »
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❝Vaughn I. Dixon❞
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En exposant le tatouage décorant mon bras, je le redécouvre, un peu. La finesse de ses traits et surtout la symbolique. Totalement absente lors de sa création, il est désormais le souvenir d'une bande de soldats à peine sortis de l'enfance, paumés dans un contexte sombre et incohérent. Je me souviens les rires, les soirées arrosées, les conversations stupides et toute la légèreté qu'on essayait de dégager pour oublier les horreurs, le sang, les pertes. J'estime avoir eu beaucoup de chance pendant ces cinq années, je n'ai pas enterré un seul camarade. Mais nous avons suivis de près un certain nombre de disparitions, la mort planant sur notre équipe comme un nuage sombre et menaçant. Il s'agit d'un vulgaire colt à l'encre noire qui renferme des souvenirs chers, ma part de militaire.
Llewyn s'en va récupérer nos verres alors que mes yeux scrutent le dessin. Je la devine, plus loin, et m'oblige à ne pas suivre ses pas. Ses chaussures retirées, la miss prend ses aises sur le canapé et je m'installe à ses côtés.
« Laisse-moi deviner : tu étais complètement torché quand tu l’as fait,
L'album choisi me plait - je n'ai aucun vinyle déplaisant ceci dit - et instaure une atmosphère plus chaleureuse, confortable. Dangereusement plaisante. Pour occuper mains et pensées j'attrape mon verre qu'elle a laissé devant nous, puis lui accorde l'autre bras dont elle s'empare sans que j'aie vraiment le choix.
" ... Peut être. Si je ne sais plus, c'était probablement le cas ! De mémoire, on est plusieurs à s'être gravé ce flingue dans la peau. "
Effectivement j'ai du mal à me souvenir précisément. Ce n'est pas si vieux mais l'alcool a très certainement aidé à prendre la décision. Un autre détail met ma mémoire en difficulté : ses doigts sur ma peau. Frais, doux, ils offrent un contact trop léger, frustrant, qui fait courir un frisson dans mon dos et accroit mon avidité. Je voudrais sentir sa paume embrasser mon bras, couvrir le tatouage, répandre la fraicheur sur le brasier que je deviens ; Je déglutis, soulagé et contrarié quand Llewyn me libère.
Sa curiosité revient et me permet de rester concentré.
" Hm, l'arme appartenait au capitaine. On rentrait de mission ; je ne sais plus vraiment mais la soirée s'est terminée sur la décision de se faire faire ce tatouage le lendemain. On a mis un certain temps à trouver un tatoueur dans ce bled... on a avalé quelques liqueurs pour se convaincre qu'il n'allait pas nous enlever le bras avec son matos, et c'était parti. "
Je suis le premier a être passé sous l'aiguille du sud-américain. Une salle glauque, moite, un matériel douteux, j'avais chaud et les messages radios sur le déroulement d'une attaque rendaient la scène totalement folle. Déconnectée. Nous attendions surtout d'être appelés. L'ordre est tombé dans la nuit, trois colts étaient nés.
" Il m'fait penser à ces gars. "
Mieux qu'une photo. Toujours avec moi, sur mon corps. Comme eux, ancrés dans mon cœur.
J'avale une gorgée du vin français et m'empêche de vider le verre - c'est une échappatoire facile à garder sous la main. Je le laisse sur la table basse et appuie mon coude sur le dossier du fauteuil afin de me tourner, face à elle, un genou grimpant sur l'assise. De la main ainsi rapprochée des siennes, j'en saisi facilement une. Le contraste entre nos températures provoque une nouvelle brûlure. Addictive. Je la tourne, la retourne entre mes doigts sans forcer le moindre geste, comme un cavalier fait danser sa partenaire : galamment, attentif. inspiré. Absorbé.
" J'ai eu un bon tatoueur équatorien mais, tes tatouages semblent naturels. "
Rien de plus artificiel en fait. Paradoxalement, je ne l'imagine pas sans. A moins que ce soit les lignes de ses mains, ses courbes, si fines, comme artistiquement pensées, créées pour être belles, captivantes, qui s'accordent parfaitement aux esquisses créatives. La génétique l'a en plus dotée de cette chevelure de feu, de ces tâches joueuses sur son visage que les yeux clairs soulignent pour envoûter le premier abruti qui vient se brûler les ailes ...
Mes doigts s'écartent pour délivrer les siens, je ramène la main à mon crâne pour retenir ma tête penchée et contempler l'irlandaise sous un angle différent. Je pourrai rester là de longues minutes à enregistrer les subtilités de sa personne, mais il est clair que ça ne se fait pas. Sans être un hôte excellent, je peux au moins rester poli :
" Tu veux boire autre chose ? Les pizzas te tentent ? "
Remplir l'espace par quelques gestes, avec ma voix grave et des propositions banales, projeter un futur studieux et encadré. Ne pas laisser le hasard s'amuser de mon impulsivité. Me persuader que je gère la situation, que cette fournaise en moi n'est due qu'à des instincts basiques. Réflexes originels, envies puériles - particulièrement intenses ; trop pour n'être que ça.